MÉMOIRE DE L’ASSOCIATION MINIÈRE DU CANADA

Contribution économique de l’industrie

Le secteur des mines du Canada contribue très sensiblement à la prospérité canadienne : en 2010, sa part du PIB s’élevait à 35 milliards de dollars et, en fonction des définitions de Ressources naturelles Canada, il emploie 308 000 travailleurs dans ses activités d’extraction, de traitement et de fabrication. Même si l’industrie est importante dans les collectivités isolées, elle engendre également de la prospérité dans nos grandes agglomérations urbaines – Toronto, Vancouver, Montréal, Edmonton, Calgary et Saskatoon – qui ont toutes des activités qui en font des chefs de file mondiaux dans le domaine minier. Notre industrie recourt en outre à plus de 3 200 fournisseurs pour obtenir toute une gamme de produits, allant des services d’ingénierie au matériel de forage. Ces entreprises forment ainsi un secteur d’approvisionnement minier qui se classe deuxième en importance dans le monde.

En 2010, l’industrie a versé aux gouvernements canadiens 8,4 milliards de dollars en impôts et redevances. Les gouvernements de Terre-Neuve-et-Labrador, de la Saskatchewan, de l’Alberta, de la Colombie-Britannique et des Territoires du Nord-Ouest tirent une part assez importante de leurs recettes fiscales du secteur minier. Après la récession, le niveau des échanges commerciaux du secteur ont augmenté, les exportations s’étant accrues de 27 p. 100 en 2010. En fait, les minéraux représentent actuellement 21 p. 100 de l’ensemble des exportations de marchandises du Canada. Par suite de cette portée mondiale, les chemins de fer canadiens (CN et CP) ont tiré plus de la moitié de leurs recettes de transport de l’industrie minière. Le Canada possède également des capacités d’exploration de calibre mondial : on estime qu’un millier de sociétés d’exploration canadiennes ont des activités dans une centaine de pays.

La situation économique actuelle

Après sept années de forte croissance, entre 2000 et 2007, une récession mondiale s’est établie fin 2008, réduisant le PIB canadien de 2,5 p. 100 jusqu’en 2009. Les prix de la plupart des minéraux ont chuté, entraînant une réduction des opérations dans les mines et les fonderies et une forte baisse des dépenses d’exploration. Toutefois, les prix des métaux ont commencé à se rétablir début 2009, et les économies mondiales ont recommencé à croître, avec la Chine en tête, à partir du dernier trimestre de 2009. La croissance s’est maintenue à un niveau assez fort pendant tout 2010 ainsi que dans les deux premiers trimestres de 2011. Les prix des minéraux ont sensiblement augmenté depuis. Dans ces conditions, l’utilisation de la capacité minière canadienne est passée de 50 p. 100 au milieu de 2009 à 70 p. 100 fin 2010. En même temps, l’utilisation de la capacité des fonderies est passée de 72 à 80 p. 100. De nouvelles mines ont commencé à produire, les mines existantes ont fait ou font l’objet de travaux d’expansion et de nouveaux projets sont en train de franchir les différents processus réglementaires d’approbation. Compte tenu des projections de croissance de la Chine, de l’Inde et d’autres pays et en supposant que le climat d’investissement demeurera positif et efficace au Canada, il est évident que le secteur minier canadien a d’excellentes perspectives dans les prochaines décennies. À l’heure actuelle, l’Association minière du Canada estime que les nouveaux investissements miniers pourraient dépasser les 130 milliards de dollars dans les cinq prochaines années, intensifiant l’activité économique dans toutes les régions du pays (voir annexe Perspectives minières canadiennes).

Une aide appréciée du gouvernement

Les gouvernements ont positivement contribué à la compétitivité du secteur minier canadien ces dernières années. Par exemple, l’investissement de 100 millions de dollars sur cinq ans annoncé en 2008 pour financer la cartographie géologique permettra de répondre aux questions qui se posent au sujet des réserves minérales du pays, particulièrement dans le Nord. Dans le domaine fiscal, la réduction de l’impôt fédéral sur le revenu des sociétés, qui fera passer le taux d’imposition à 15 p. 100 d’ici 2012, est un facteur positif, de même que les précisions techniques récemment données par l’Agence du revenu. Le crédit d’impôt pour l’exploration minière associé aux actions accréditives encouragera la prospection et la découverte et donnera encore plus d’expertise au Canada dans ce domaine à l’échelle mondiale. Au chapitre de la réglementation, les changements apportés dans le cadre de la loi d’exécution du budget fédéral 2010 minimiseront les délais d’évaluation environnementale et élimineront des obstacles à une meilleure concertation entre les autorités fédérales et provinciales d’évaluation. Pour ce qui est de l’examen du service de transport ferroviaire, la réponse du gouvernement a été constructive, notamment en ce qui concerne les ententes de services, les pénalités en cas de non-exécution et les moyens de mesure courants. Ces propositions devraient être mises en œuvre.

Les difficultés que connaît l’industrie

En contrepartie de ces mesures positives, il reste encore de nombreux défis à relever pour l’industrie minière et les entreprises d’exploration :

  • Processus réglementaires : Les processus réglementaires fédéraux comportent encore des éléments inefficaces, des incohérences et des chevauchements. De plus, les processus d’examen des projets peuvent prendre cinq ans ou plus. Le Bureau du vérificateur général a lui-même noté que ces retards et délais prolongés ne favorisent pas de bons résultats dans le domaine environnemental.
  • Infrastructure : C’est dans l’industrie minière que se recrutent les plus gros clients du secteur canadien des transports. L’industrie a besoin d’un bon service, d’une logistique efficace et de prix compétitifs. Cela est parfois difficile à obtenir dans le domaine du transport ferroviaire, là où existe le duopole CN/CP. Des investissements sont également nécessaires dans des domaines tels que les routes nordiques et les ports de mer toutes saisons, les liaisons ferroviaires et intermodales et les installations maritimes comme les terminaux Ridley (où le récent octroi d’un pouvoir d’emprunt constitue un développement positif). Des investissements publics bien ciblés peuvent augmenter la rentabilité de nombreux projets miniers dont la réalisation est envisagée dans des régions isolées.
  • Ressources humaines : L’industrie minière canadienne aura besoin chaque année d’une dizaine de milliers de nouveaux travailleurs pendant la prochaine décennie afin d’atteindre ses cibles de production. Au moment où beaucoup d’employés spécialisés de l’industrie atteignent l’âge de la retraite, les programmes postsecondaires ne produisent pas suffisamment de diplômés. De plus, il y a une forte concurrence mondiale quand il s’agit d’attirer les compétences minières particulièrement recherchées.
  • Innovation : L’industrie minière investit quelque 650 millions de dollars par an dans la R-D, soit plus que des secteurs clés tels que l’automobile et les produits forestiers, mais il est quand même nécessaire d’en faire davantage. Les technologies les plus intéressantes portent sur les cartes de données à trois dimensions, les systèmes destinés à augmenter l’efficacité des opérations de dynamitage, de forage et de levage, etc. L’industrie croit que les mécanismes de recherche du gouvernement n’accordent pas un soutien correspondant aux besoins, aux priorités et aux contributions de l'industrie.

Recommandations

Pour affronter ces difficultés et d’autres, l’Association minière du Canada présente les recommandations qui suivent au Comité permanent des finances dans le cadre des consultations préalables au budget 2012.

1) Remédier aux obstacles et aux insuffisances réglementaires – Même si cette question ne semble pas directement concerner un comité des finances, elle est de nature économique parce qu’elle influe directement sur la capacité de l’industrie de créer des emplois, de la richesse et de la croissance pour les Canadiens.

Il est important que les fonctionnaires des ministères responsables de l’environnement, des pêches et du Nord soient chargés, dans le cadre de leur mandat, de collaborer avec l’industrie et les intervenants afin d’éliminer les obstacles réglementaires, législatifs et opérationnels qui freinent inutilement le développement économique durable. En particulier, il faudrait préciser l’interprétation et l’application de la Loi sur les pêches, en vérifier la cohérence et mettre en place un système d’observation prévisible et adapté aux risques. On devrait, au besoin, envisager des modifications de la loi ou des règlements. La Loi canadienne sur l’évaluation environnementale devrait être modifiée de façon à reconnaître comme équivalents les processus provinciaux qui répondent aux exigences minimales fédérales ou qui les dépassent. Entre-temps, il faudrait recourir plus souvent à des délégations de pouvoirs en faveur des processus provinciaux. On devrait en outre améliorer les règlements d’application de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs et de la Loi sur les espèces en péril, afin d’assurer à l’industrie plus de certitude en matière de conformité, de réduire le recours aux procédures judiciaires et de mieux s’aligner sur les mesures et les exigences provinciales.

2) Faire des investissements stratégiques dans l’infrastructure et l’innovation – Le prolongement de la ligne de transmission de la route 37, dans le nord-est de la Colombie-Britannique, et l’investissement fédéral de 130 millions de dollars constituent de bons exemples des incidences positives des investissements en infrastructure : ces travaux amélioreront avec le temps la situation économique de projets miniers d’une valeur estimative de 15 milliards de dollars. De même, le prolongement prévu de la route des Monts Otish, dans le nord du Québec, favorisera la réalisation future de projets de mise en valeur de gisements d’or, de diamants, de cuivre et d’uranium dans la région environnante. Dans le Grand Nord, il faudrait investir dans des projets prioritaires tels que les routes et les ports de mer toutes saisons. Les gouvernements devraient collaborer étroitement avec l’industrie pour investir dans les grands projets d’infrastructure des transports et de l’énergie qui contribuent à ouvrir des régions entières au développement économique et à la création de richesse.

Pour ce qui est du défi de l’innovation, le Conseil canadien de l’innovation minière discute actuellement avec des organismes gouvernementaux des moyens de renforcer le soutien des priorités de l’industrie en matière d’innovation, comme la gestion des résidus, les rendements énergétiques, les moyens efficaces d’exploration, etc. On peut se demander si les organismes de financement reconnaissent vraiment la nature stratégique de l’industrie minière canadienne. Des organismes fédéraux clés, comme le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, devraient envisager de renforcer très sensiblement leur appui à ces priorités. De plus, nous estimons, dans le cas du programme fédéral de RS&DE, qu’une plus grande interaction avec l’industrie permettrait aux responsables de l’Agence du revenu du Canada de mieux comprendre le secteur minier et ses priorités de recherche. Un comité de direction technique pourrait aussi augmenter la cohérence et réduire les délais des processus de réclamation et d’appel.

3) Continuer à s’occuper des pénuries de compétences – Les gouvernements devraient collaborer avec l’industrie, les écoles, les groupes autochtones et d’autres collectivités pour répondre aux besoins du secteur en matière d’acquisition de nouvelles compétences, de mobilité et d’immigration. À cet égard, l’appui du gouvernement fédéral aux travaux du Conseil des ressources humaines de l’industrie minière est très utile, de même que son soutien du Conseil sectoriel de la construction et du Conseil canadien des ressources humaines de l’industrie du pétrole, organismes qui sont tous appuyés par le Programme fédéral des conseils sectoriels. Nous croyons savoir que le financement de base de ce programme sera progressivement coupé dans les 18 prochains mois. L’Association minière du Canada espère, avec un optimisme prudent, que le Conseil des ressources humaines de l’industrie minière et ses partenaires, y compris l’AMC, trouveront un moyen de maintenir le conseil pour lui permettre de poursuivre le bon travail qu’il fait. Nous exhortons le gouvernement fédéral à veiller à ce que des groupes tels que le CRHIM aient accès à l’avenir à du financement pour continuer à analyser le marché du travail et à s’occuper du système d’agrément.

Le programme Partenariat pour les compétences et l’emploi des autochtones (PCEA) a eu un grand succès depuis qu’il a été établi en 2003, contribuant à la préparation de plus de 18 000 Autochtones canadiens à des emplois spécialisés. Le secteur minier canadien, qui constitue le plus grand employeur privé d’Autochtones, a été un partenaire et un partisan très actif du programme PCEA. Nous sommes inquiets du fait que le PCEA prend fin en 2012. Il ne s’agit pas seulement de la contribution fédérale à la formation et à l’acquisition de compétences parmi les Autochtones. Le PCEA constitue un modèle efficace pour renforcer la coopération entre les collectivités autochtones et le secteur minier et créer des relations de travail basées sur la confiance. Nous espérons que d’autres programmes pourront remplir le vide que laissera la disparition du PCEA.

Pour l’avenir, il est évident que le Canada connaîtra une période marquée d’importantes possibilités. La capacité de l’industrie à amener ces projets au stade de la production d’une manière durable dépendra de nombreuses variables, dont les trois que nous mentionnons dans les recommandations qui précèdent.

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